L'Homme se crée les génies dont il a besoin.
La création a eu lieu les 22, 23, 24 et 25 septembre 2016 au
Casino Théâtre de Rolle
Tout a été dit, écrit, pensé, sur Mozart, l’enfant aimé des dieux devenu prince des compositeurs. Mais peut-être a-t-on juste oublié l’essentiel. Wolfgang Amadeus avait une sœur, aimée que de son père mais talentueuse elle aussi. Nannerl. Rien n’a été conservé d’elle, ou si peu, quelques lettres, une courte trajectoire qui part de la musique pour s’échouer dans un terne mariage ponctué de naissances et de morts. Son malheur : avoir été femme, à une époque où l’art était chose trop sérieuse pour pouvoir être confiée au beau sexe. Aujourd’hui, sa figure reste essentielle pour comprendre Mozart comme un homme plutôt que comme un génie tombé du ciel.
Deux violons interprètent ses plus belles pages, alors qu’une descendante de Nannerl intervient pour livrer sa vision de l’histoire. Pas d’emphase ni de pédagogie dans cette pièce – concert théâtral autant que monologue musical – qui juxtapose une narration franche et une suite musicale respectueuse. Comme pour rappeler cette évidence : l’Homme se crée les génies dont il a besoin.
Les œuvres, composées par Wolfgang Amadeus Mozart, sont jouées dans des adaptations pour deux violons. Dans l’ordre d’apparition :
Pour mettre en relief, entourer, commenter ou sublimer les pièces musicales, le texte de Thierry Raboud choisit de se tenir à distance de toute pédagogie. Pas de dates, de déblatérations musicologiques, de considérations historiques. Mais de l’humour et un ton vif, cinglant. De quoi donner corps au personnage et faire vivre la musique classique. Qui a tout à y gagner.
ExtraitsFaut-il nécessairement traverser ce pont de douleurs pour mettre le pied sur des rives où tant d’autres ont déjà débarqué ? Oui, j’aimais Mozart, mais tout le monde aime Mozart. Comme on aime reconnaître ce que l’on connaît déjà. Comme on aime se nourrir de ce que d’autres ont digéré pour nous. Comme on aime l’idée rassurante que la perfection, quelque part, existe.
A chaque époque sa beauté. Mais il en est qui irradient par-delà les siècles. Alors on s’empare de ces délicatesses avec la peur d’essouffler le miracle. On se laisse précautionneusement glisser sur ces pages usées par l’histoire, lissées par les crins de milliers d’archets. Qu’y a-t-il encore à en tirer ? Un peu de joie peut-être ?
Un miracle? Vous n’y pensez pas. Mozart : fantasque, fêtard, tenace dans son espièglerie. Un gamin génial, évidemment. Mais le vrai miracle, n’est-ce pas cette grande sœur Nannerl, fille de persévérance? Car Herr Leopold Mozart était un père ambitieux, qui ne se contentait pas de discourir. Oui, Nannerl sera son premier miracle, où le talent, l’effort et le plaisir se tiennent la main. Et dansent.
Une enfance trop parfaite, il fallait bien que quelque chose se passe. Dysfonctionne. Je me suis lancée, applaudissements, lumières vives, silence. L’angoisse qui percute les tempes, éclabousse les tympans, déferle dans le bas du ventre. Le crin crie et s’effiloche. Un futur s’émiette. La fin de quelque chose. Et l’enfant soudainement, devint adulte.
Photos © Pierre-Benoît Querton et © William Gammuto
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